samedi 26 juillet 2008

Le Kivu toujours en turbulences en dépit de l'accord de paix de janvier 2008

Les accrochages, exactions et déplacements de civils se poursuivent dans le Kivu (est de la République démocratique du Congo), riche région entrée en convulsions après le génocide au Rwanda voisin, malgré un accord de paix signé en janvier par tous les belligérants. Ces troubles armés, alimentés par la prédation des minerais (coltan, or) pèsent aussi sur l'écosystème du Parc national des Virunga où les miliciens braconnent sévèrement les animaux sauvages, notamment les derniers gorilles des montagnes. La Mission de l'ONU en RDC (Monuc) vient de lancer un nouvel "appel pressant" à tous les groupes armés signataires de l'accord de paix de Goma (capitale du Nord-Kivu) pour qu'ils cessent "leurs graves exactions de toutes sortes" contre les civils, selon sa porte-parole à Kinshasa, Sylvie Van Den Wildenberg.
"Une tension persiste entre les forces en présence, ce qui entretient un climat de peur permanente au sein des populations civiles et empêche le retour de plus d'un million de personnes vulnérables dans leur foyer", a-t-elle poursuivi. L'errance sans fin des civils au gré des exactions et des accrochages armés, principalement des agriculteurs qui se retrouvent sans terre et sans moyens autonomes de subsistance, est aussi dénoncée par l'organisation non gouvernementale Human Rights Watch (HRW).
L'association dit avoir recensé plus de 200 meurtres de civils et le viol de centaines de femmes et de jeunes filles commis depuis janvier par tous les groupes armés, y compris les soldats de l'armée congolaise. "Six mois après la signature de l'accord de paix, la situation des droits humains n'a connu aucune amélioration et en fait dans certaines zones, elle s'est détériorée", selon Anneke Van Woudenberg, chercheuse pour l'Afrique de HRW.
Le programme "Amani" (paix en kiswahili) a été lancé après l'accord de Goma. Il porte sur un "acte d'engagement" prévoyant un cessez-le-feu immédiat puis un désengagement progressif des troupes sur le terrain avant leur démobilisation. Son artisan et médiateur, l'abbé congolais Apollinaire Malu Malu, joint jeudi au téléphone à Goma par l'AFP, "regrette beaucoup et condamne ces exactions". "Les exactions se produisent dans des lieux inaccessibles, entre groupes en compétition. Il sont à deux km les uns des autres, il faut les séparer d'une vingtaine de km", explique-t-il. L'essentiel des accrochages a lieu dans les zones montagneuses de Rutshuru et de Masisi, situées au nord de Goma, et frontalières du Rwanda et de l'Ouganda.

samedi 12 juillet 2008

Le cri des Evêques de la RDC lors de leur assemblée plénière 2008

Conscients de la gravité de la situation, ils interpellent tout le monde: “ Il est temps de nous réveiller pour ne pas brader notre souveraineté nationale et trahir notre nation. Nous redisons avec force: le Congo n’est pas à ven­dre. L’avenir du Congo appartient aux Congolais ”. Un autre cri de guerre. Mais faut-il s’arrêter là, à ces ap­pels de vigilance ? Ou multiplier les campagnes de sensibilisation tant auprès des dirigeants que des di­rigés pour justement provoquer ce changement at­tendu par tout le monde ?
Réunis du 7 au 11 juillet 2008, les Archevêques et Evêques de la Conférence Episcopale Natio­nale du Congo, CENCO, vien­nent d’adresser un message pa­thétique d’espérance et d’inter­pellation au peuple congolais et à ses dirigeants. Un message qui ressemble plus à une sonnette d’alarme tant le tableau peint par les Evêques catholiques est dra­matique. C’est-à-dire, “ un Congo toujours exsangue et extraverti; une population meurtrie, appauvrie, plongée dans une misère sans nom et continue à brayer du noir, des hommes et des femmes fatigués d’une crise multiforme, politique, spirituelle, morale, des valeurs ”.
D’où cette dénonciation en des termes vigoureux des “ 5 fléaux ” qui rongent la Républi­que démocratique du Congo. Il s’agit de la Corruption, de la Mi­sère sociale, de la Faiblesse de l’Etat, de l’Insécurité et de l’Ex­ploitation irrégulière des ressour­ces naturelles.De la Corruption, les Evê­ques catholiques disent “ qu’elle est devenue le cadre général de vie et d’action socio-politi­que en RD Congo. Il y a péril en la demeure. Pour bâtir un grand Congo ne serait-il pas urgent de décréter une année de lutte contre la corrup­tion ? ”
La Misère sociale, pour­suivent les Evêques catholiques, se remarque par cette flambée de prix des denrées alimentaires, l’usage désabusé de la drogue et des abus sexuels, et des contrées entières semblent purement et simplement abandonnées par l’Etat dans un enclavement qui hypothèque tout développement pour les populations. “ Ne nous voilons pas la face, en RD Congo des personnes meurent de faim ”, souligne la déclaration de la CENCO.Bien plus, les Evêques enfoncent le clou : “ Il y a aujourd’hui un mur qui sépare toujours davantage les riches des pauvres. La tension salariale entre les hommes po­litiques et les agents de l’Etat appelle des réformes urgentes. Bien des salaires ne sont tou­jours pas payés, les ensei­gnants et bon nombre d’agents de l’Etat sont clochardisés. Ce qui fait craindre une nouvelle vague de grèves à la prochaine rentrée scolaire si rien n’est fait pour les enseignants. Il est surprenant que même des sociétés minières n’arrivent plus à payer leurs agents.... Nous ne pouvons accepter une démocratie à deux vitesses, où il y a d’un côté ceux qui vivent dans l’opulence et de 1’autre ceux qui doivent se contenter des miettes ”.
En ce qui concerne la Fai­blesse de l’autorité, de l’Etat, les Evêques catholiques espèrent l’émergence d’un leadership plus visionnaire et dynamique ”.
Et ce à tous les niveaux et dans tous les secteurs. Et comme cela va de soi, cette absence de leadership entretient l’insécurité “ A l’heure actuelle la faiblesse de l’autorité de l’Etat se mani­feste par une insécurité crois­sante et une instabilité politique persistante. L’insécurité semble aujourd’hui générali­sée dans le pays. Des assassi­nats ciblés des personnes sur les routes et dans les maisons se multiplient. Des éleveurs Mbororo immigrés dans le Nord de la Province Orientale sacrifient les champs de la po­pulation, tuent tout autre herbivore, en faveur de leurs Va­ches. Des éléments de la rébellion ougandaise LRA pillent dans les paroisses et maisons religieuses, enrôlent des jeu­nes dans leur rébellion, et ré­quisitionnent des adultes pour des travaux dans leurs champs. Des FDLR et autres réfugiés rwandais contrôlent encore des portions du terri­toire. Des Congolais sont re­foulés de l’Angola dans des conditions inadmissibles. Des Frontières sont de plus en plus sans contrôle. Autant de situations qui devrait interpeller le Gouvernement ” font remarquer les Evêques.
Enfin, de l’Exploitation ir­régulière, illégale, massive et abu­sive des ressources naturelles, tant minières que forestières, dérange les consciences serei­nes. Pire, soulignent les Evêques, les contrats léonins et les trafics d’influence “ mettent à nu la cupidité de nos congénères autant que des étrangers ”.