jeudi 20 novembre 2008

Au Congo, on ne fait plus confiance en la MONUC


Accusés de parti pris et d'incompétence, les casques bleus de l'Onu présents dans l'est de la République démocratique du Congo éprouvent le plus grand mal à trouver leur rôle dans un conflit qui menace de faire tache d'huile et de dégénérer en catastrophe humanitaire

Une décennie après leur arrivée dans l'ex-Congo belge, 'ventre mou' du coeur d'une Afrique qui regorge de richesses minières et agricoles, les 'soldats de la paix' sont pris entre le feu et les critiques des belligérants - l'armée régulière congolaise et les rebelles tutsis du général déchu Laurent Nkunda, qui campent aux portes de Goma depuis des semaines.
L'armée de Kinshasa et la population civile dénoncent l'impuissance et l'incapacité des 17.000 soldats et policiers de la Mission des Nations unies au Congo (Monuc), retranchés dans leurs bases du Nord-Kivu. Les hommes du général Laurent Nkunda les taxent d'être partisans. Quant aux diplomates, ils soulignent leur attitude de grande confusion.
Lors de la progression, à partir de la fin août, des rebelles, qui ont mis en déroute une armée gouvernementale chaotique, les casques bleus de la Monuc ont paru hésiter, incapables d'empêcher le sang de couler et incertains sur les moyens de rétablir la paix.
"Je ne suis plus sûr de ce qu'est notre position aujourd'hui. Nous étions prêts à intervenir mais nous ne l'avons pas fait", témoigne un officier supérieur de la Monuc après la progression des forces rebelles qui ont bousculé l'armée congolaise et même ignoré les menaces des hélicoptères d'attaque des Nations unies.

3100 casques bleues en plus!



Le Conseil de sécurité de l'ONU a approuvé à l'unanimité l'envoi de 3.100 soldats supplémentaires dans le cadre de sa force de maintien de la paix au Congo-Kinshasa, la MONUC.

Les 15 membres du Conseil de sécurité ont voté jeudi matin. Ils affirment que la situation, dramatique, nécessite le renforcement de la Mission des Nations unies au Congo-Kinshasa (MONUC), qui comptait jusqu'à présent 17.000 hommes. Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon avait demandé l'envoi d'effectifs supplémentaires.
Certains disent aussi que cette mesure pourrait encourager la recherche d'une résolution politique du conflit, pour faire cesser les combats opposant les hommes du chef rebelle Laurent Nkunda à l'armée congolaise. La situation a provoqué une crise humanitaire, avec au moins 250.000 personnes déplacées depuis le mois d'août.

vendredi 14 novembre 2008

Les évêques du Congo parlent de génocide dans le Kivu

1. Nous, Archevêques et Evêques, membres du Comité per­manent de la Conférence Episcopale Nationale du Congo, réunis à Kinshasa, en session extraordinaire du 10 au 13 novembre 2008, affligés et bouleversés par la tragédie humaine dans l’Est et dans le Nord-Est de la RD Congo, lançons un cri de détresse et de protesta­tion. En effet, juste un mois vient de s’écouler depuis que notre Conférence Epis­copale Nationale du Congo, par son Président, a fait une déclaration en rapport avec la reprise des hostilités dans l’Est et dans le Nord-Est de la RD Congo . Malgré nos appels pathétiques aussi bien à nos gouvernants qu’à la Communauté inter­nationale, hélas ! la situa­tion dans cette partie de no­tre pays n’a fait qu’empirer. Elle vient d’atteindre des proportions insupportables, très inquiétantes et suscep­tibles de déstabiliser toute la sous-région si on n’y prend garde. Oui, aujourd’hui, comme le dit l’Ecriture : une voix en RD Congo s’est fait entendre, des pleurs et une longue plainte ; c’est Goma, Kiwanja, Dungu..., c’est la nation tout entière qui pleu­re ses enfants et ne veut pas être consolée, car ils ne sont plus (cf. Mt 2, 18).Génocide silencieux ?
2. Un vrai drame hu­manitaire qui s’apparente a un génocide silencieux dans l’Est de la RD Congo se dé­roule sous les yeux de tous. Les massacres gratuits et à grande échelle des popula­tions civiles, l’extermination ciblée des jeunes, les viols systématiques perpétrés comme arme de guerre : de nouveau une cruauté d’une exceptionnelle virulence est en train de se déchaîner contre les populations lo­cales qui n’ont jamais exigé autre chose qu’une vie pai­sible et décente sur leurs terres. Qui aurait intérêt à un tel drame ?3. Le plus regrettable, c’est que ces événements malheureux ont lieu sous l’œil impassible de ceux qui ont reçu le mandat de maintenir la paix et de protéger la population civile. Nos propres gouver­nants se montrent impuis­sants devant l’ampleur de la situation, donnant l’impres­sion de ne pas être à la hau­teur des défis de la paix, de la défense de la population congolaise et de l’intégrité du territoire national. La classe politique tout entière ne semble pas prendre la mesure de sa responsabilité devant ce drame qui risque d’hypothéquer l’avenir de la nation.Ressources naturelles et plan de balkanisation : nerf de la guerre
4. Il est évident que les ressources naturelles de la RD Congo alimentent la convoitise de certaines puissances et ne sont pas étrangères à la violence que l’on impose à sa po­pulation. En effet, tous les conflits se déroulent dans les couloirs économiques et autour des puits miniers. Comment comprendre que les différents accords soient violés sans aucune pression efficace pour contraindre les signataires à les respecter ? Les diverses con­férences et réunions pour dénouer cette crise n’ont toujours pas abordé les questions de fond et n’ont fait que renvoyer et déce­voir les attentes légitimes à la paix et à la justice de no­tre peuple. En outre, le plan de balkanisation que nous ne cessons de dénoncer est exécuté par des personnes relais. On a l’impression d’une grande complicité qui ne dit pas son nom. La grandeur de la RD Congo et ses nombreuses riches­ses ne doivent pas servir de prétexte pour en faire une jungle. Nous demandons au peuple congolais de ne jamais céder à toute velléité de balkanisation de son ter­ritoire national. Nous lui recommandons de ne jamais souscrire à une remise en question de ses frontières internationalement établies et reconnues depuis la con­férence de Berlin et les ac­cords ultérieurs.Condamnation
5. Nous condamnons avec véhémence cette manière ignoble de considérer la guerre comme moyen pour résoudre les problèmes et accéder au pouvoir. L’ordre institutionnel issu des élections démocratiques dans notre pays doit être sauvegardé.- Nous dénonçons tous les crimes commis sur des pai­sibles citoyens et désap­prouvons de la manière la plus absolue toute agres­sion du territoire national.- Nous fustigeons le laxisme avec lequel la Communauté internationale traite le pro­blème de l’agression dont notre pays est victime.Que demandons-nous ?
6. Nous demandons ins­tamment la cessation des hostilités et la garantie des conditions de sécurité pour le retour des déplacés sur leurs terres.
7. De toute urgence, nous en appelons à la solidarité nationale et internationale pour un accroissement de l’aide humanitaire en faveur des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants entas­sés. dans des camps.
8. Nous invitons toute la population congolaise à un sursaut national pour vivre en frères et sœurs, dans la solidarité et la cohésion nationale, afin que la RD Congo ne som­bre pas dans la violence et les divisions.
9. Nous exhortons le Gouvernement congolais à mettre tout en oeuvre pour rétablir la paix sur toute l’étendue du territoire natio­nal. C’est le devoir sacré de nos gouvernants d’exercer leurs fonctions régaliennes afin de protéger le peuple et de garantir la sécurité aux frontièreS. Nul n’ignore que l’absence d’une armée ré­publicaine est préjudiciable à la paix dans le pays.
10. Nous demandons à la Communauté internationale de s’impliquer sincèrement pour faire respecter le droit international Nous estimons impérieux l’envoi d’une for­ce de pacification et de sta­bilisation pour rétablir notre pays dans ses droits. Tout le monde gagnera avec un Congo en paix plutôt qu’un Congo en guerre.Engagement de l’Eglise
11. Solidaire de la souffran­ce de son peuple, l’Eglise ­famille de Dieu qui est en RD Congo s’engage à accom­pagner ses fils et ses filles, meurtris pour les conduire sur le chemin de la réconci­liation et de la paix. Elle ex­prime sa reconnaissance à Sa Sainteté le pape Benoît XVI pour son attention au drame de la RD Congo, ses appels répétés à tous pour une solution pacifique et pour l’aide financière qu’il vient d’apporter lui-même afin de soulager des popu­lations déplacées.12. Puisse le Seigneur qui a veillé pendant des heures au jardin de Gethsémani et qui a ressenti comme fai­tes à lui-même toutes les souffrances infligées et im­posées aux membres de son corps (cf Mt 25, 31-46), veiller avec nous et nous soutenir devant ce drame que connaît notre pays.Que la Très Sainte Vierge Marie, Reine de la paix, ob­tienne la paix à notre chère patrie.